Moi, ce dont j'ai hâte, c'est du mois d'août. Les rares soirées où la nuit ne m'aura pas trop fait boire, je me coucherai peu après minuit pour mettre mon réveil à dix heures. Je me lèverai alors, j'embrasserai Jude qui dormira encore à côté de moi, je m'habillerais d'un t-shirt et d'une culotte parce qu'il fera très chaud dans notre appartement. J'irai à la cuisine faire du café, je le verserai dans une belle tasse en porcelaine, j'y mettrai deux sucres et je m'installerai sur la terrasse avec un gros livre qui me fera mal aux bras. Sonia, déjà levée depuis des heures me rejoindra pour me demander comment j'ai dormi et puis le chat - un petit chat tout gris - viendra nous réclamer des croquettes et des câlins. Je tournerai les pages au fur et à mesure que le soleil me hâlera doucement la peau, il y aura des melons frais dans le frigo et j'en piquerai un pour le manger en finissant mon douzième chapitre. Le cendrier sera déjà rempli, la deuxième tasse de café bue.
A midi trente les portes de ma chambre et celle d'Aurélien s'ouvriront quasi simultanément parce que l'odeur de la tarte aux légumes qu'on a préparées avec Sonia aura pénétré dans leurs narines. Et précipitamment on s'assiéra à table, couverts en mains, salive en bouche, pour remplir nos estomacs. Puis au dessert Aurélien m'accusera d'avoir mangé le melon qu'il voulait et on rira ensemble comme des heureux personnages de films.
J'ai hâte de ces après-midis libres. Peut être même qu'on aura un tout petit jardin où pousseront des fleurs et des salades. Peut-être qu'il y aura ce jour là une nouvelle expositions au musée Beaubourg et qu'on décidera d'y aller, après tout nous n'aurons qu'à prendre le métro. Mais moi, je ne voudrai pas. arroser les plantes, je ne voudrai pas voir des tableaux, moi, je voudrai lire mes livres. J'ai une demi centaine de blocs de papier précieux qui m'attendent impatiemment sur mon étagère. Je voudrais les serrer dans mes bras les embrasser et les lire tous en même temps pour ne pas les rendre jaloux. Je voudrais tous les mettre dans mon sac, sous mon oreiller, dans mon café du matin,. Je ne veux plus les laisser mourir. je veux les manger.