11 janvier 2023

Les bonnes choses.

Je reviens avec un litre et demi de confiture maison, la mémoire des petits coups de fesses du bébé contre ma paume, plein de photos de chiens, mais aucune du cèdre du Liban, dont l'image est impregnée depuis cinq ans dans ma rétine.

C'est l'endroit du monde où je sais le mieux épeler le mot sérénité. Il y a un poêle et des poils de chiens, assez de vieilles assiettes porcelaine pour un entrée plat dessert pour douze, une dizaine de coffrets de polly pocket tous plus ingénieux les uns que les autres, une machine à laver qui tourne sans jamais s'arrêter alors qu'elle a quatorze ans, le frigo jamais vide aussi bien à l'intérieur qu'à l'extérieur, de la lavande aux quatre coins des pièces qui devient grise avec le temps mais qui ne perd pas son odeur.

J'y dors aussi bien que j'y lis, la lumière y est parfaite, la literie moelleuse et accueillante, et même l'aspirateur ronronne avec douceur - au moins une fois par jour. Le soir, j'y bois toujours mais jamais à outrance, on ne se couche jamais tard mais jamais tôt non plus, on ne parle de rien mais le silence n'y a jamais sa place. J'ai le choix entre trois canapés et trois lit pour rêvasser, il y a trois étagères remplies de livres, et deux salles de bain. On peut manger dedans ou dehors, se laver dans un douche ou dans une baignoire, dormir totalement calfeutré dans la chambre du bas ou bien dans celle du haut la porte ouverte et avec les chiens. 

Je n'y fais rien, et c'est mieux que tout. Parfois on va étendre le linge dans le jardin, aider Christiane à installer Zoom sur sa nouvelle tablette, ou encore faire un tour en voiture jusqu'au centre équestre voir les beaux chevaux dont a si peur la grande chienne. Mes matins y sont tous semblables : lorsque je me lève il y a toujours du pain à moitié entammé sur la table et au moins deux sortes de confiture. Le café est à sa deuxième tournée, on ne me demande jamais si j'en veux, j'ai toujours une tasse chaude servie d'office. Ils sont levés, depuis plusieurs heures, ont déjà balade les doigts, fait un tour à la boulangerie, fait leurs exercices de respiration, et parfois même fait les courses. Si je dors trop tard, ils laissent les truffes des deux bestioles me reveiller ; l'effet est sans appel. 
Les trajets en voiture sont indentiques : quel que soit le chemin que l'on prend, les gros flancs du Lubéron sont visibles depuis l'auto. Ses écailles formées par les arbres aux feuilles caduques changent de couleur à chaque heure de la journée. Le paysage entier ne chaque que vaguement : il n'y a qu'entre mai et août que  ce paisible paradis devient encore plus éclatant, avec les touffes de lavande qui se gonflent en rangs serrés sous la fenêtre.

Je ne sais pas si un jour je pourrai vivre à la campagne. Ce que je sais, ou que du moins je constate à chaque fois que je Viens, qu'elle que soit la durée et la saison, c'est que c'est ici, indéniablement, que je ressens le plus intensément l'apaisement et le bonheur.