Je me suis trompée de train.
Il me restait 2% de batterie sur mon iPhone, et trente pages à lire de mon bouquin. J'en avait pour deux heures et demi de trajet à tuer.
J'ai tué les minutes comme je pouvais. J'ai appuyé ma tête contre la vitre sale et un peu grasse du train et j'ai soudain senti l'odeur de mon épaule : une odeur suave de draps de lit humides d'amour, l'odeur de ton dos doux et glissant sous cette chaleur, l'odeur de nous amours.
Parfois je voudrais te faire comprendre comment je t'aime. Je crois que tu ne comprends pas. On ne se comprendra jamais sur certaines choses, nous avons vécu trop différemment pour avoir pleinement conscience des désirs et des attentes de l'autre. Je m'imagine parfois que l'amour, c'est pour les enfants...
Je suis une enfant, encore. Une enfant qui a été gâtées durant des années, une enfant capricieuse et exigeante, qui voudrait enrober ton coeur et y injecter ses mots... Pardon, pardonne le bébé que je suis et qui pleure sans raison : pour un voyage, pour des moustiques...
J'aime les livres. Pas pour l'histoire, mais pour le langage exquis, la tournure des phrases et les figures de style. J'aimerais qu'on puisse lire l'un l'autre comme dans un livre ouvert : pas pour comprendre mais pour être compris, surpris, pour réagir. Moi j'en ai marre de ne pas te comprendre quand tu te tais, quand seuls les trois points de suspension sortent de ta bouche. J'en ai marre aussi quand tu ne me comprends pas, ou que tu fais semblant, ou que tu as peur. Je suis gourmande mais je ne te mangerai pas ; en revanche je mangerai tes mots réconfortants, tes fortes embrassades, tes regards sincères.
Tu n'est pas un hérisson pour rien. Mais tu as un tigre, pas sur ton épaule mais dans tes poumons : quand tu dors il s'éveille ; réveille le aussi pour me protéger, moi, le bébé capricieux que je suis.
(le train, finalement, n'a pas su me soutirer mes larmes, je suis rentrée plus fatiguée d'avoir trop pensé que d'avoir trop voyagé)