24 septembre 2025

Lumière d'août.

Le frère travaillait à la scierie. Tous les hommes du village travaillaient à la scierie ou pour elle. On y sciait des sapins. Il y avait sept ans qu'elle était là, et, dans sept ans, toute la région se trouverait déboisée. Alors, une partie du matériel et la plupart des hommes qui la faisaient marcher, n'existant que pour elle ou à cause d'elle, seraient chargés dans des wagons de marchandises et trans-portés ailleurs. Mais une partie du matériel serait laissée sur place, car on pouvait toujours acheter des pièces de rechange en paiements échelonnés grandes roues immobiles, décharnées, fixant le ciel avec un air d'étonnement profond, parmi des monceaux de briques, de ronces embroussaillées, chaudières calcinées, dressant d'un air entêté, surpris et hébété, leurs tuyaux qui ne fumaient plus et se rouillaient au milieu d'un paysage hérissé de souches d'arbres, paysage de désolation, calme, paisible, inculte, terre tombée en friche, où, lentement, des ravines engorgées et rougeâtres se creusent sous les longues pluies tranquilles de l'automne et la fureur galopante des équinoxes de printemps.

William Faulkner, Lumière d'août