J'avais fini de corriger mes copies. Je re- voyais continuellement la même scène, floue, d'un samedi et d'un dimanche de juillet, les mouvements de l'amour, l'éjaculation. C'était à cause de cette scène, oubliée pendant des mois, que je me trouvais ici. L'enlacement et la gesticulation des corps nus me parais- saient une danse de mort. Il me semblait que cet homme que j'avais accepté de revoir avec lassitude n'était venu d'Italie que pour me donner le sida. Pourtant, je n'arrivais pas à établir un rapport entre cela, les gestes, la tiédeur de la peau, du sperme, et le fait d'être là. J'ai pensé qu'il n'y aurait jamais aucun rapport entre le sexe et autre chose.
Annie Ernaux, L'événement.