Ici
Puis ma couleur de peau a changé.
Je ne me rappelle plus bien du code de la porte de bureau ;
Je n'en ai pas.
On a escarpiné des dizaines de kilomètres de pavés,
Le porto a rincé nos dents,
Le vent a emmêlé mes cheveux,
Mes viscères ont ensanglanté ma culotte.
J'ai mangé à outrance,
J'ai jalousé les vieilles dames avec leurs cannes et leurs chiens virevoltant dans ces rues inondées de soleil...
Il est Octobre !
Et je ne sais quel chemisier mettre. J'ai transpiré dans tous.
J'ai usé mes baskets,
J'ai grincé mes genoux. J'ai sucré mon argent. J'ai sussuré mes peines à la mer.
Et puis ce soir je n'ai pas pris de douche parce que mes genoux ont le goût de sel d'avoir embrassé l'océan.
J'ai embrasé mes désirs de foutre en l'air chaque seconde passée à Paris. Sous les toits en zinc, les comptoirs en bois, les pintes en happy hour, les pièces qui dégringolent du portefeuille maigre.
C'est mon filet, mon exutoire.
C'est ma came.
J'y tourne le clip de ma vie, j'y connais chaque sortie de métro avec escalators, j'y vomis dans les poubelles, j'y égorge ma dépression. J'y manque tant d'oboles.
Paris, quand elle est loin, ne me manque pas. Ne me manquent que les bouches qui y piaillent, que les lèvres qui y grésillent, que les doigts qui y tapotent le rythme envoûtant de mes insomnies. J'en prends plein la vie, j'en prends plein les dents. Je m'édente au tempo des bouffées de joints, au tintement des verres, aux oeillades au bitume six étages plus bas. Je m'y suis consumée à vif, j'y suis à point, il faudrait partir maintenant ; bientôt. Un jour de pluie : n'importe lequel.
Mais il est difficile de trouver un instant où je n'y aimerai plus personne.
Poison de ma vie.