18 janvier 2011

Je me perds derrière des arbres que mes rêves ont planté dans leurs pots.

   Mais.
   J'avais acheté ce carnet, cette nuit, un beau carnet lisse, grand et petit, clair et sombre, doux et rugueux, couleur or et sang, avec mille pages vides gribouillées, arrachées intactes. Je me souviens de la couleur du papier à l'intérieur, de son poids entre mes doigts, de l'instant où je le mets dans mon sac. Je me souviens de la fille qui me l'avait offert : c'était Alexandra. Elle avait ses habituels cheveux longs - deux fois plus longs que d'habitude - son beau sourire, elle m'avais appelé avec des mots doux, elle m'avait parlé et dit des choses dont je ne me rappelle pas peut être était-ce tout simplement des regards, si perçants qu'on aurait dit des phrases, des textes entiers ?
   Et ce carnet ? où est-il maintenant ? Où est ce sac dans lequel je l'ai mis que je n'ai jamais eu ? Où est passée cette nuit, cette fille, cette pénombre si rayonnante ? J'avais prévu, cette nuit, d'écrire dedans tous mes petits poèmes, ceux qui ont coulé comme la sueur le long de mon dos, quelques soirs particulièrement tristes ou angoissants... C'est bien cela : c'est l'angoisse. L'angoisse de me réveiller et de perdre non pas ce petit carnet superbe, mais les 65 kilos qui me disent chaque jour qu'ils m'aiment.

   L'angoisse de la réalité et de son absence.