04 août 2018

Contraction.

   En rebroussant chemin depuis la dernière salle blanche sous les combles que je n'avais jamais vue, en redescendant les escaliers d'un noir muet s'étirant de toute la hauteur de la grange, en retraversant la première salle pour sortir j'ai eu un singulier pincement au coeur, aux tripes. Il provenait du sentiment que j'avais de savoir que ce serait la dernière fois du monde que je visite ce musée. Cet espace inquiétant et étrange qui m'a cisaillé d'un électrochoc esthétique la première fois, il y a neuf ans où j'y ai mis les pieds comme Alice dans la foret de son pays des Merveilles.
   Il n'était plus aussi impressionnant qu'en 2009. Je suis plus grande, dans mes baskets et dans ma tête ; et la surface, les œuvres, le propos m'ont paru plus petits, amoindris par le poids de mon bagage culturel, par le poids de mes propres angoisses et frénésies. Tout comme mon amour, né lors de ma première visite pour l'art pur, la création brute n'est plus aussi prégnant qu'aujourd'hui. Comme le sentiment de l'amour qui m’exaltait avec violence et me faisait vibrer de toutes ses forces autrefois, m'apaise et me rassasie petit à petit désormais aujourd'hui.
   Ce lieu cristallise le commencement et l'achèvement d'un parcours celui de mes études, celui de ma jeunesse, celui de certains de mes idéaux, celui de mes désirs.

   Seulement deux cent pages me séparent de la fin, d'une fin, de peut-être la première fin de ma vie que je saurai pleinement mettre à profit du reste de ma vie.