10 octobre 2013

La vie d'Adèle.

   Des années que je n'ai pas ressenti un film.
   La vie d'Adèle... non, la bouche d'Adèle. Adèle pleure, Adèle rit, Adèle mange mais elle ne parle pas. Adèle n'a pas besoin de parler, ses lèvres parlent à sa place : elles sont grasses de bolognaise, gluantes de morve, tremblantes de pleurs, humides de baisers. Abdellatif est un fétichiste de la bouche.
   Des années que je n'ai pas vécu un film.
   La vie d'Adèle est un petit chemin poussiéreux tout tracé : parcours ordinaire, famille ordinaire, envies ordinaires... un truc pas palpitant du tout. Et pourtant je me suis surprise à avoir quelquefois le coeur un peu noué, en me mettant à sa place, en ayant pitié d'elle, peur pour elle, honte d'elle. Elle ne joue pas un personnage, c'est nous qui nous glissons dans sa peau.
   Des années que j'ai pas vu un film.
   Je ne sais pas si c'est un chef d'oeuvre. Je ne sais pas si c'est un film innovant, engagé, bien filmé, intelligent ou moralisateur. Je sais juste que quand on me parle de cinéma j'imagine à peu près ça : quelque chose d'assez irréaliste filmé de manière assez réaliste.



   Ce qui est osé c'est pas les 15 minutes de sexe filmé en gros plan, c'est les 2h45 de détails du quotidien, qui laissent bouche bée de naturalisme. Bouche bée comme Adèle durant tout le film.