12 juin 2013

Marqueur de page.

   Les belles princesses ne sont qu'un fin voile un peu rosâtre sous tes yeux. Parfois, tu les humectes de ta langue chétive et tu leur dis à dieu. J'ai envie de raconter une histoire sur toi car tu as la forme de mon héros de roman préféré: tu n'existes plus autant mais tu vogues dans l'air furtivement et en s'évaporant dans mes poumons tu me pinces parfois un peu le coeur. Oh, non, je ne voudrais plus utiliser ce mot qu'on s'est autrefois si longtemps et monotonnement répété. J'ai banni son sens de mon dictionnaire. Je l'utilise maintenant comme tout le monde : pour dire peu, pour dire des choses sèches, cornues et fades : mes sentiments. Oui, oui, j'aime. j'aime comme on aime les escargots, la mer et les nuits blanches. J'aime doucement, par vagues, selon l'humeur. Je suis une jolie fleur qui fane et fane sans jamais flétrir, je suis poussin qui perd son duvet doux pour se transformer en poulet laid et gras. C'est moi qu'il faudrait appeler Elaide...
   Tu es devenu hérissé et gris, et fou mais différemment : un peu plus pour le public, un peu moins pour toi... un peu comme si tu redevenais quelqu'un de sensé. C'est pas volontaire, c'est moi, c'est ma faute, c'est parce que je suis partie. Nous deux, on s'ennuyait à être beaux et bien faits comme dans les films. Alors nous étions fous. Follement beaux, follement passionnés, follement fous l'un de l'autre. Nous étions fous. Nous ne le sommes plus ; nous sommes de jolis tableaux pastels et délavés, de l’impressionnisme, en somme. Mais par-delà les années les mois et les années qui nous ont réunis et séparés nous avons les yeux en face des trous de l'autre. Tu le vois bien : je ne vois rien, et je vois la fleur, la petite fleur frisée que tu est parvenu à devenir. Tu es d'un peu toutes les couleurs, Un arc-en-ciel, formé de rien : d'eau et de lumière, ou plutôt de bière et de nuits blanches. Tu es devenu un imposant bonhomme. J'ai peur de toi quand je te vois. j'ai peur et je t'envie. Et je suis fière, et triste, et gaie, et fade, et morte, et muette, et palpitante et rageante, et exaspérante et grise, et molle, et pitoyable et morte. Voilà. Tu me fais sentir que je suis morte. Mais qu'est-ce que cela veut dire, si je ressens ? Suis-je ton pantin ? Ta bestiole ? Ta petite chatte, ton gri-gri ton annuaire gauche ? 
   J'ai vécu une petite vie avec toi. Je déteste y penser car je pleure à chaque fois comme si tu étais mort alors que c'est moi. Sale mioche. Foutu magicien. Vas-y, moques-toi de moi, je ne sais même plus écrire, même plus conjuguer mes verbes, même plus parler même plu te dire la même chose que tu me dis toi. Incapable de répéter, d'avoir la force de vouloir répéter au moins un brin de ce qui nous ferait du bien.
  Tu dois être honteux de m'aimer, si tu m'aimes encore un peu. Je le pense tout le temps et ça ne me rends qu'encore plus morose. 
   Pardonne moi, petite chose folle que tu es. Pardonne moi de n'être qu'une Ombre.


mon univers est fini
mon âme est finie
ma pensée est finie
mon cœur est fini

mon univers te parle
mon âme t'écoute
ma pensée te parle
mon cœur t'écoute

ton cœur murmure
ta pensée pense
ton âme panse
ton univers éclot

notre univers est fini
notre âme est infinie
notre pensée est finie
notre cœur est infini



je m'en réjouis, promis.