13 janvier 2013

La révolution à l'envers.

   Je suis allée au cinéma, et puis te rejoindre en pensant naïvement qu'on rentrerait ce soir en noctilien. J'en ris maintenant.

   Dans un bel appartement du Marais rempli de beaux gens bien habillés, un homosexuel inconnu dont c'était l'anniversaire m'a rasé le quart de la boule à Z. Il a eu de la chance d'avoir une belle gueule sinon je lui aurais cassé les dents. Danser sur le canap' était le moindre de tous les évènements de la soirée. Je ne dirai pas tout car la vie ne peut se résumer avec des phrases.
   - Pikachu et un carlin.

   Et puis ces pauvres gens sont décédés avant le lever du soleil. Je ne sais ce qui m'a pris d'accepter de courir avec toi jusqu'au Babylone, une confiance aveugle, une envie pressante, un besoin démangeant. Nous sommes arrivées seules au monde, seules dans l'univers total qu'était le sous-sol violet et multicolore. Et puis un verre, puis deux, puis trois, puis cinq, puis plus, puis autre chose. On était les plus belles. Les-plus-belles. Puis c'est toi qui l'a dit : ce qui a été fait dans cette boite restera dans cette boite. Même le sous-sol.

   Dehors, c'était un temps frais pour l'heure du repas de midi ; on a choisi la brasserie les plus bondée de gens normaux pour un dimanche en famille. Un brunch. Le mien était soft : deux Martini, un croissant. Offert par R., 36 ans, un des rares rescapés à peu près pas trop chiant de l'after. Et puis il y a un Martini qui a muté en Martini-oignon-frite, mais c'était toujours aussi bon. Je crois que ce n'est pas bien de parler de sodomie devant des petits enfants le dimanche midi. Je crois qu'on pouvait être excusés par le fait qu'on a mangé la plus infecte salade de fruits de tout l'univers intersidéral. C'était dégueulasse à en mourir de rire. On est morts de rire dans une impasse à dix mètres, malgré le fait que je ne sache pas rouler avec un temps et un taux d'alcool pareil.
   C'était fini, on rejoignait la bouche de métro, on a frôlé les joues de R. pour lui dire merci, au revoir et à bientôt. Mais non. "Nous vous rappelons que suite à la manifestations contre le mariage homo les stations Gobelins et Place d'Italie se seront pas desservies." Quoi ? la tienne et la mienne ?! Je m'excuse auprès de la pauvre dame de la RATP que j'ai engueulée, après tout ce n'est pas sa faute. Alors on est parties à pied. On a croisé des milliers et des milliers et des milliers et des milliers d'hommes et de femmes de la pire espèce qui existe : celle de l'intolérance. Alors, on a fait la révolution à l'envers. A contre sens. Main dans la main. Bouche sur la bouche car le mariage pour tous, on en veut. Les "casse-toi", les "sale pute" étaient mignons. Nous on était fières, bourrées et fières. On a choqué et énervé quelques milliers de personnes. C'est agréable de bon matin. Enfin, matin... tout est relatif. 
   Chez toi, en pyjama, on a allumé mes potes : Thomas, Dorian, et on a galopé un peu avant de s'écrouler dans tes beaux draps roses jusqu'à 22h.
   Quand je suis rentrée chez moi de minuscules flocons de neige me mordaient le visage.

   Heureusement que demain est un autre dimanche.