25 juin 2010

Belle du Seigneur.

   - Mon Dieu, mais pour qui me prends-tu ?
   - Mais pour une putain, dit-il mélodieusement. Pour une petite putain très rusée.
   - Ce n'est pas vrai ! s'écria-t-elle, dressée, frémissante. je te défends de dire cela !
   - Comment, tu crois vraiment que tu es une femme honnête ?
   - Certainement ! et tu le sais ! J'étais désemparée par mon horrible mariage. ( Le coup de l'araignée, pensa-t-il.) je suis une femme honnête !
   - Excuse-moi, mais. (Il simula une hésitation de courtoisie.) mais tu revenais à ton mari un peu. (Il feignit de cherche un adjectif poli.)  Un peu moite de ce monsieur Dietsch et, enfin, je pensais que ce n'était pas tout à fait honnête.
   - J'ai eu tort de ne lui avoir pas avoué, mais j'avais peur de lui faire de la peine. C'est mon seul tort. De tout le reste, je n'ai pas à rougir. Mon mari était un pauvre être. j'ai rencontré un homme qui avait un âme, lui, une âme !
   - De combien de centimètres ?
   Elle le regarda, stupéfaite, comprit enfin.
   - Tu es révoltant !
Albert Cohen - Belle du seigneur